Nicolas Job relate les fait marquant de l’année 2021 sur la location de voitures et sur le marché de la mobilité.
La production de semi-conducteurs consomme énormément d’eau. En Asie, notamment dans la région de Taïwan, on a observé au cours des années 2020 et 2021 de faibles moussons. Cela a entraîné une pénurie d’eau qui a ralenti la production de semi-conducteurs.
D’autre part, les entreprises asiatiques ont mis en place une politique sanitaire drastique. Un cas positif au Covid entraîne l’arrêt des lignes de production.
Enfin, le transport des marchandises pose toujours de vraies difficultés. Le canal de Suez est très encombré et le prix du container atteint des sommets.
Tout cela contribue au ralentissement de l’approvisionnement en composants qui équipent aujourd’hui toutes les voitures, notamment les électriques. Ces puces gèrent notre sécurité (freinage, direction, affichages…).
La conséquence de ce phénomène est la baisse du volume de voitures, et la transformation nécessaire de la distribution automobile. Enclenchée par le Covid, cette mutation s’accélère avec la multiplication de configurateurs automobiles. Ils sont optimisés pour augmenter les ventes en ligne et la livraison des véhicules. On note également une hausse des ventes de véhicules d’occasion due aux faibles volumes de production de voitures neuves.
Les priorités des constructeurs sont donc différentes par rapport aux gros consommateurs de voitures que sont les loueurs. On anticipe des flottes réduites en 2022, jusqu’à -50% des volumes par rapport à 2019. On reste également en attente de nouvelles vagues pendant les mois à venir. La prévision des achats de flottes devient difficile et l’obtention de modèles spécifiques pour constituer des flottes homogènes est complexe. La rentabilité est impactée et les stratégies des entreprises vont changer. Une hausse des prix est à prévoir. Les cartes seront rebattues pour savoir comment fournir des véhicules aux clients les plus contributifs comme aux autres.
Toujours au niveau des loueurs, on retrouve d’un côté les loueurs du Big 5 (Hertz, Enterprise, Avis, Sixt Europcar) et les loueurs indépendants qui vivent la situation différemment. Leurs structures sont plus légères, certains se concentrent sur des véhicules spécifiques, comme les utilitaires par exemple. Le BTP n’ayant pas beaucoup été impacté par la crise, les loueurs indépendants ont continué à bien fonctionner. Ces loueurs ont été largement plébiscités par les besoins en livraison des entreprises. Les loueurs indépendants ont donc répondu à cette demande.
Les loueurs internationaux s’approvisionnent en "buy back", ils louent de 6 à 7 mois des véhicules jusqu’à 15 000 km. Cela permet d’avoir des véhicules tout le temps très récents. Les indépendants eux, ont des modèles d’approvisionnement plus hybrides. Ils alternent entre "buy back" et achat en direct (qu’on appelle aussi achat en propre) pour revendre les véhicules plus tard. Ces achats sont plutôt favorisés par les concessionnaires et les loueurs peuvent se fournir plus rapidement.
La fourniture de véhicules est donc moins impactée sur les loueurs locaux.
Avec la crise des semi-conducteurs, les constructeurs automobiles sont très pregnants sur le marché de la location courte durée. 2021 aura été une année assez forte en termes de prise de position des constructeurs.
Volkswagen fait une offre de rachat sur Europcar en septembre 2021. Avant Eurazeo, Volkswagen était déjà propriétaire d’Europcar. Ça donne une très belle impulsion pour ce loueur, avec de grands changements au niveau de sa direction. Tesla a vendu 100 000 véhicules à Hertz. Le « ping-pong » entre Elon Musk et la direction de Tesla sur Twitter a impacté la valorisation boursière de ces deux géants. Elon Musk a, pour un temps, démenti les commandes. Cela montre aussi l’importance la puissance de la marque sur un des plus gros loueurs du marché.
Enfin Stellantis, avec ses deux marques Free2move (anciennement PSA) et Leasys (anciennement FCA) prend une position très forte. On ne sait pas encore comment ses deux loueurs vont coexister au sein du groupe. Mais cela montre que ce constructeur veut se montrer prépondérant sur la location de voitures en mettant en avant l’usage du véhicule plutôt que sa propriété. Très récemment, le constructeur s’est rapproché du Crédit Agricole pour créer un acteur majeur de la location longue durée. Cela pourrait causer de grands bouleversements sur les chaînes de services proposés par le groupe.
Les Maas (Mobility as a Service) sont des plateformes naissantes qui arrivent de plus en plus sur la partie collectivités locales. Il n’existe pas encore de MaaS privés mais certains loueurs s’y tentent. On a vu chez Sixt, une offre de location “abonnement”. C’est ce que tout le monde attend ! Une offre sur le modèle de Netflix dans la location de voitures. Sixt y va à fond ! Ils proposent des services VTC, mettent à disposition des trottinettes… On est clairement sur un changement de positionnement : d’un loueur courte durée à une solution de Maas. Plusieurs plateformes voient le jour, Carbookr en motorisent certaines. Nous sommes de plus en plus sollicités par ces plateformes qui veulent intégrer la location de voitures, après avoir travaillé sur les transports en commun.
Bravo à nos amis de Virtuo pour leur levée de fonds record ! C’est un élément intéressant de la transformation de la location courte durée vers de nouveaux modèles d’utilisations. C’était 80 millions d’euros levés et encore un développement à venir sur le business travel et puis sur d’autres pays.
On peut aussi observer l’introduction en bourse de Toosla, autre loueur nouvelle génération avec des véhicules connectés aujourd’hui très centrés sur Paris et Madrid.
Il y a d’autres loueurs locaux qui prennent position au niveau national, je pense à Rentscape, à DLM… Ce sont des marques que peu connues des acheteurs et des travel managers, ou même tout simplement des particuliers s’ils n’ont pas d’agence à côté de chez eux. Notre mission est de les sourcer. Du coup, on les voit évoluer, et on voit toutes ces nouvelles marques arriver et renouveler le marché en termes de modèle économique, d’achats de véhicules, de propositions de services et d’implantations d’agences.
Nicolas Job