Le voyage d’affaires est une notion globale qui comprend l’ensemble des déplacements professionnels. On parle de voyage d’affaires pour un déplacement de plusieurs heures à plusieurs jours.
En France, le voyage d’affaires représente un marché de 29,9 milliards d’euros (source : Epsa) et plus de 1300 milliards d’euros dans le monde en 2017 (source : Amex GBT).
Depuis 2020, ce marché est très fortement impacté par la crise sanitaire mondiale. En 2020 le marché a connu une baisse spectaculaire de 70%. Encore aujourd’hui, le marché n’est qu’à 50% de son niveau de 2019. Cela s’explique notamment par les réglementations sanitaires pour des voyageurs qui transitent à l’étranger, des habitudes et des usages qui ont profondément été bouleversés (visioconférences, réduction des déplacements…) et une volonté pour les entreprises d’affirmer leurs démarches R.S.E.
Le voyage d’affaires est composé de 4 segments. C'est-à-dire 4 métiers dont un voyageur d’affaires a besoin pour ses déplacements professionnels.
Selon une étude interne à Carbookr, en janvier 2022, les déplacements aériens sont le premier poste de dépenses dans le voyage d’affaires. En effet, avec 35% du budget alloué aux déplacements, ils représentent un moyen de transport à haut coût, notamment sur les vols internationaux.
En 2018, En part de marché, les compagnies aériennes leaders en Europe sont : Lufthansa (12,3%) Ryanair (12%) et IAG (9,8%).
En mars 2020, le marché aérien (loisir et business) a enregistré des pertes s’élevant à 370 millions d’euros. Cela s’est traduit par une baisse moyenne de 67% du chiffre d’affaires des compagnies aériennes. Avant cette période, ¼ passager est un voyageur d’affaires.
Aujourd’hui, le volume de réservations des voyageurs d’affaires peine à retrouver son niveau d’antan. La crise sanitaire a dessiné de nouveaux usages. Selon Greg Hayes, PDG de Raytheon technologies Corp, “30% du trafic est lié aux voyages d’affaires mais on peut faire l’économie de la moitié au moins de ces vols”. En 2021, selon une étude de Bloomberg, les chefs des grandes entreprises suisses veulent diminuer leurs dépenses en business travel de 20 à 40%.En réalité, les compagnies aériennes vont devoir se réinventer, pour sortir par le haut de cette crise. Il faudra d’abord créer plus de valeurs sur le parcours client et les services associés aux voyageurs d’affaires : infrastructures, accompagnement… De nombreux questionnements existent sur les classes affaires. Les politiques RSE des entreprises poussent les collaborateurs à rationaliser leurs voyages. Les classes affaires deviennent alors un non-sens : sur une même surface, on fait voyager 2 à 3 fois moins d’usagers en classe affaires qu’en classe éco. En resserrant les sièges, on pourrait transporter plus de personnes pour un même vol et baisser le taux d’émission par passager.
Justement, les compagnies low cost sont celles qui parviennent à mieux résister à la crise du marché. Leur activité est largement soutenue par la clientèle loisirs.
La SNCF a longtemps détenu le monopole du transport ferroviaire sur les lignes à grande vitesse comme sur les TER. En 2019, son chiffre d’affaires s’élevait à 35,1 milliards d’euros. Le voyage d’affaires représente 20% du volume des réservations SNCF et 40% de son chiffre d’affaires (source : L’écho Touristique). C’est donc un marché primordial pour cette entreprise publique historique, qui transporte plus de 5 milliards de voyageurs en 2019.
Comme l’aérien, le trafic ferroviaire a été fortement impacté par la crise du Covid. En 2020, la SNCF a enregistré une baisse de son chiffre d’affaires de 5 milliards d’euros. Les nombreuses grèves de 2019 avaient déjà fragilisé la situation économique de l’entreprise.
Cependant, la compagnie a répondu aux nouvelles demandes de ses clients. Elle a adapté son offre pro et proposé un abonnement télétravailleurs. En effet, depuis la crise sanitaire, le télétravail partiel a été un recours massivement adopté par les entreprises. En permettant aux collaborateurs de travailler dans une éloignée de leur domicile, la SNCF est revenue à des niveaux presque similaires à ceux d’avant crise. De plus, les déplacements en train sont devenus une alternative écologique et durable aux voyages aériens.
Depuis 2021 et l’ouverture à la concurrence, de nouveaux acteurs exploitent le rail pour faire voyager les usagers. L’entreprise italienne Trenitalia exploite la ligne à grande vitesse Paris-Lyon. Dès son lancement, la compagnie a pratiqué des tarifs agressifs avec des classes affaires au moins équivalentes à celle de la SNCF. La classe exécutive est, quant à elle, aux standards des prestations haut de gamme réclamées par les clients. Les fauteuils en cuir sont larges et accueillants, l’espace à bord est conséquent, et le service de haut niveau.
D’autres compagnies feront leur apparition dans les années à venir. L’espagnol Renfe devrait exploiter les lignes à grande vitesse dans le sud de la France. L’allemand FlixTrain, a renoncé à exploiter 5 lignes sur le territoire national en France pour des raisons de coûts d’infrastructures.
Le secteur de l'hôtellerie est composé de grands groupes et de très nombreux indépendants qui se partagent un marché très atomisé. Le leader sur son marché est le groupe Mariott avec plus de 1,4 millions de chambres disponibles dans le monde. Son challenger est le géant chinois Jin Jiang qui détient plus d’1 million de chambres dans le monde entier.
Le groupe Accor est le premier acteur français et le leader européen de l’hôtellerie avec 300 000 chambres dans le monde entier. Avec un total de 40 marques, Accor est positionné dans l'hôtellerie de luxe avec ses marques Sofitel, Raffles, Fairmont… Le premium est assuré par, entre autres, Pullman et Swissotel. Pour ses offres milieu de gamme, Accor détient les marques Novotel et Mama Schelter, et la marque Ibis pour ses chambres économiques.
Durement frappé par la crise, le secteur hôtelier a enregistré des pertes colossales. 237 000 emplois ont disparu (hôtellerie + restauration) entre février 2020 et février 2021.
Pourtant, de nombreux hôtels ont su se réinventer et trouver les opportunités nécessaires au retour des voyageurs d’affaires. Les groupes CitizenM et Okko ont pensé leurs infrastructures spécialement pour le nouveau parcours de leurs clients. Les chambres sont plus petites et très fonctionnelles. Elles accueillent en général des voyageurs d’affaires qui y séjournent pendant 1 ou 2 jours. Les chambres de plus de 20m2 ne sont plus indiquées.
Depuis la crise, les hôtels ont grandement digitalisé leurs services. Les espaces de coworking se placent de plus en plus près des zones de restauration, et même dans les lobbies des hôtels. Le haut débit, le cloud sécurisé, les ordinateurs à disposition, tout est fait pour que les collaborateurs puissent travailler comme au bureau. Certains voyageurs se voient proposer un téléphone portable local ou des mini box wifi, pour rester connecté facilement.
Une attention particulière est aussi portée à la restauration. Les menus “sans gluten” ou “sans sucre” sont proposés aux voyageurs d’affaires. Des produits locaux et frais sont proposés à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit. Les menus à base de poisson remplacent peu à peu les viandes rouges et les sauces. La nutrition d’un voyageur en déplacement doit être adaptée à ses journées de travail.
La location de voitures est le dernier segment du voyage d’affaires. Dans le parcours du collaborateur, il est souvent le dernier mode de transport pour aller rendre visite à un client, un partenaire, un fournisseur… Il peut être l’unique moyen de locomotion, ou s’intégrer dans un parcours client multimodal (exemple : taxi - avion - voiture de location).En période pré-covid, le voyage d’affaires représentait encore 45% du marché de la location de voitures (source : Voyages d’affaires). Cependant la crise sanitaire ainsi que la crise des semi-conducteurs a largement déstabilisé le marché. Les leaders du marché (Enterprise, Avis, Europcar, Hertz et Sixt) ont accusé des baisses de chiffre d’affaires, jusqu’à -45% pour Europcar.
Conscients de cette situation, les acteurs de la location de voitures ont largement digitalisé leur offre et augmenté la sécurité de leurs clients. La désinfection des véhicules est rentrée dans les standards. Les états des lieux sont souvent numérisés (ProovStation) et les gains de temps se font à tous les niveaux. Réservation, livraison des véhicules, restitution en parking libre-service… Le déplacement professionnel doit être le plus fluide possible.
La RSE dans la location de voitures est un sujet des plus importants. Les loueurs de voitures s‘équipent en véhicules faibles émissions (hybrides rechargeables et électriques). La demande des entreprises est croissante sur ce sujet puisque celles-ci prennent des engagements en matière de protection de l’environnement. Dans ce cas, la voiture devient une alternative crédible qui permet de baisser les émissions de CO2 par km parcouru. Les demandes de véhicules grande capacité (Minivan, Monospaces…) augmentent dans les déplacements en covoiturage. Il n’est pas rare de voir plusieurs collaborateurs voyager dans le même véhicule pour réaliser des économies et baisser leur empreinte carbone.
Les acteurs d’autopartage et de location de véhicules à la journée se multiplient dans les grandes villes comme dans les plus petites agglomérations. S’ils rendent un réel service de micromobilité, ils s’adressent plutôt à une clientèle loisir et ne permettent pas des solutions de paiements et de facturations adaptés à un utilisateur professionnel.
Le voyage d’affaires, en particulier en France, est composé de nombreux intermédiaires. Pour agréger tous les acteurs du voyage d’affaires, de nombreux outils doivent être connectés pour proposer aux entreprises clientes comme aux voyageurs, une solution fluide et globale pour les déplacements professionnels.
Le S.B.T. (Self Booking Tool) est un outil de réservation incontournable dans le voyage d’affaires. Les SBT agrègent les offres des acteurs du voyage d’affaires, et offrent aux entreprises la possibilité de paramétrer leurs politiques voyages liées aux déplacements.
L'intérêt des SBT est de centraliser les réservations au sein d'un seul et même outil. Grâce à la limitation des réservations sauvages, l'entreprise pourra piloter ce poste de dépenses et assurer la sécurité de son collaborateur en déplacement.
Pour optimiser au maximum le temps et la visibilité des volumes de réservations, les agents de réservations, assistant(e)s de direction, travel managers… utilisent le SBT pour réserver des billets d’avion, des chambres d'hôtels, des voitures de location, des billets de train… Un SBT va également permettre de modifier ou annuler certaines réservations, envoyer des accusés réceptions aux voyageurs, permettre des systèmes d’approbations aux managers… Dans la gestion du profil des voyageurs, les SBT sont garants de la confidentialité et de la protection des données personnelles. En effet, l’enregistrement de pièces d’identité, permis de conduire… est parfois nécessaire pour le déplacement des collaborateurs.
L’avantage du SBT est de clarifier au maximum l’activité voyage d’affaires auprès des travels managers et de simplifier le processus de réservation pour les collaborateurs en charge.
Concur, KDS, Traveldoo et Cytric fournissent des SBT aux plus grandes entreprises du marché. Ils intègrent avec leur solution voyage d’affaires une solution expense pour la gestion des notes de frais.
Des nouveaux entrants comme Ayruu, The Treep et Fairjungle proposent des outils novateurs pour la gestion du voyage d’affaires. Le SBT The Treep axe ses solutions avec une dimension RSE très forte. L’outil privilégie les voyages les moins polluants tout en répondant aux besoins exprimés par l’utilisateur. Fairjungle propose un outil particulièrement simple. Il permet à des collaborateurs “novices” de réserver sans avoir de compétences particulières dans le travel.
Le G.D.S. (Global Distribution System) est un système de réseau informatisé. Il permet de générer des transactions entre les différents acteurs du voyage (Hôtels, compagnies aériennes, loueurs de voitures, compagnies ferroviaires et agences de voyage).
Les GDS s’appuient sur la disponibilité en temps réel des fournisseurs primaires. Ils proposent donc des prestations tarifées et directement réservables, mais ne les composent pas directement. En effet, un agent de voyages peut réserver une location de voiture sur un GDS, mais l’offre émane bien du prestataire de location de voitures. Un GDS ne détient pas de stock d’offres de location de voitures ou de billets d’avion.
Cependant, les GDS ne possèdent pas l’offre la plus exhaustive du marché. En effet, pour être référencé sur un GDS, un loueur de voitures devra avoir la structure nécessaire et les ressources suffisantes pour connecter son système d’information à celui d’un GDS. De plus, la présence sur un GDS représente un coût non négligeable pour le fournisseur. C’est pourquoi les GDS font encore l’impasse sur de nombreux hôtels, loueur de voitures locaux, ou compagnies aériennes de faible envergure.
3 entreprises se partagent la majorité du marché : Sabre, Amadeus et Travelport. Ce sont des entreprises d'envergure internationale. Cependant Sabre est leader sur le marché international et Amadeus sur le marché européen.
On trouve aussi des GDS moins populaires sur les marchés occidentaux. TravelSky, un GDS géré par l'État chinois. KIU est un GDS populaire en Amérique latine.
Les MaaS (Mobility as a Service) sont des solutions de mobilité multimodales. Elles s’adressent aux collaborateurs qui ont besoin de services de transport très divers durant leurs déplacements. Un MaaS a la capacité d’agréger une liste exhaustive de moyen de locomotion, privés et publics dans une seule et même application. On retrouve dans un MaaS :
Les MaaS sont des outils techniques qui parviennent à identifier les offres en temps réel des moyens de mobilités disponibles. Ils intègrent également des systèmes de paiement directement sur l’application. C’est un enjeu important pour les travel managers et les responsables en charge du budget voyages.
Les MaaS rendent aussi service aux agglomérations et aux municipalités. Les pouvoirs publics sont intéressés par ses outils pour fluidifier la mobilité des administrés. Plus globalement, la mobilité urbaine voire micro urbaine reste un élément d'attractivité et de dynamisme des villes et des communes. Par la collecte de données sur les transports, les élus prennent des décisions plus pertinentes sur les infrastructures à mettre en place pour les citoyens.
Les MaaS les plus avancés sont aujourd’hui Lyko, Whim et Moovit. Mais ce marché est loin d’avoir atteint la maturité. De nombreuses évolutions auront lieu notamment sur les systèmes d'agrégation des fournisseurs publics (métro, bus…) et les paramétrages clients. En effet, les politiques voyages étant parfois complexes, de nombreuses possibilités doivent être offertes aux clients : système d’approbation des voyages, possibilité de réserver en toute indépendance, remontée des offres selon l’utilisateur, intégration des tarifs clients…
Gérer des voyages d’affaires demande un certain nombre de ressources pour une entreprise. La question du temps passé sur les réservations, l’efficience du choix des fournisseurs, les modes de paiement, le duty of care… Pour ce faire, la plupart des entreprises choisissent de faire appel à des agences de voyages spécialisées, pour optimiser au mieux leurs déplacements professionnels.
Les TMC (Travel Management Company), sont des agences de voyages d’affaires. Elles prennent en charge l’ensemble de la préparation d’un voyage d’affaires en composant la meilleure solution avec les prestataires. Hôtels, billets d’avion, de train ou encore location de voitures, la TMC peut préparer un déplacement de A à Z. Cependant, avec l’avènement des SBT, les TMC permettent aussi aux clients de programmer eux-même leurs voyages d’affaires. En effet, elles laissent la partie opérationnelle aux collaborateurs de l'entreprise et interviennent en tant que conseiller auprès des personnes en charge de la réservation.
En revanche, elles prennent la main sur les voyages en complexes. Elles assurent aussi un service d’assistance auprès des voyageurs de plus en plus importants dans la politique voyage des entreprises. Pour le client, La TMC est l’interlocuteur expert et unique pour tous les voyages d’affaires.
Le marché des TMC est dominé par trois leaders du marché : CWT (Carlson Wagonlit Travel), Amex GBT et BCD Travel.
CWT et Amex ont été créées dans la deuxième moitié du 19ème siècle. La première était nommée à l’origine la CWIL (Compagnie Internationale des Wagonlits et du Tourisme). La deuxième était une entreprise de transport de fonds. En 2019, CWT annonce un chiffre d’affaires de 22 milliards de dollars. Amex GBT affiche la même année un chiffre d’affaires de 33,7 milliards de dollars.
Depuis la reprise du voyage d’affaires, les grandes TMC ont pour objectif de se concentrer sur les PME. En effet, la moitié d'entre elles ne passent pas par une agence pour organiser leurs voyages d’affaires. “Ce sont des clients très digitaux dans leur utilisation, ouverts sur de nouveaux produits.” affirme Yorick Charveriat, General Manager France, Amex GBT.
Les nouvelles agences de voyages sont des entreprises tech qui rassemblent l’expertise voyage à l’outil technique de réservation. Elles offrent une solution clé en main à l’entreprise cliente.
Ce modèle a été impulsé par Egencia. C’est la première agence de voyage, au début des années 2000, à proposer un outil de réservation intuitif, développé en interne, auprès de ses clients. En offrant la possibilité à ses clients de passer eux-mêmes leurs réservations, ils ont sensiblement fait baisser les fees liées aux coûts des prestations clients.
Dans la catégorie des “néo TMC”, on retrouve : Okarito, Super Tripper, Travel Perk, Trip Actions, Travel Planet…Elles proposent leur propre SBT, avec une interface distincte, paramétrable et intuitive.
Ces néo agences ont mis en place un mode de paiement différent. Auparavant, les agences de voyages étaient payées à la commission. Aujourd’hui les néo agences proposent des abonnements mensuels ou annuels par utilisateur.
En conclusion, le voyage d’affaires est un secteur fortement intermédié et interconnecté. Depuis la pandémie, les entreprises ont profondément bouleversé leur mode de déplacements. Elles sont particulièrement exigeantes sur la sécurité de leurs collaborateurs, l’efficience des déplacements et la maîtrise de leur empreinte carbone. Les fournisseurs du voyage d’affaires doivent évidemment prendre en compte ces nouvelles demandes tout en fluidifiant au maximum l'expérience de leurs clients.